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Le JPB > L'opinion > Tribune Libre 2008-02-06
Txetx Etcheverry / responsable de la Fondation Manu Robles-Arangiz en Pays Basque nord
L´urgence

S’attaquer aux inégalités sociales pour combattre la crise écologiste : tel est le propos central des conférences qu’Hervé Kempf donnera les 12 et 13 février en Pays Basque nord.

Dans ces réunions publiques intitulées "Comment les riches détruisent la planète", Hervé Kempf, journaliste scientifique au quotidien Le Monde spécialisé dans les questions d’environnement, se livre à une implacable démonstration.

Nous n’avons qu’une planète :

La crise écologique ne nous laisse pas le choix : nous n’avons qu’une planète alors que l’empreinte écologique moyenne d’un Européen1 en nécessiterait trois et celle d’un Américain (du Nord) six ! Il faut impérativement diminuer l’impact de la vie humaine sur la biosphère, en diminuant la consommation matérielle, le prélèvement de la matière et la transformation des écosystèmes.

Comment y arriver dans un monde où la plus grande partie de la population n’a même pas de quoi vivre décemment, et doit au contraire consommer plus ? Rappelons ici que 800 millions d’humains souffrent de la faim et 2 milliards de carences alimentaires, et qu’un milliard de personnes vivent dans des bidonvilles. Même en Occident, des couches très importantes de la société connaissent une grande précarité. Il est donc évident que nous devons nous fixer un objectif global de "Consommer moins et répartir mieux"

Réduire le niveau de vie

des plus riches

L’Amérique du Nord, l’Europe et le Japon totalisent environ un milliard d’habitants, soit moins de 20% de la population de la planète mais consomment 80% de la richesse mondiale. Enlevons de ce milliard les plus pauvres et disons qu’environ 500 millions de personnes devront demain réduire leur consommation matérielle, leurs dépenses d’énergie, leur production de déchets, leurs déplacements automobiles et aériens. Il n’y a pas d’autre solution digne de ce nom à la crise écologique actuelle, c’est aussi simple que cela.

La seule manière que ces 500 millions acceptent une telle révolution, c’est de commencer par le haut, de baisser le niveau de vie des plus riches. Cela aura deux types d’effet immédiats, direct et indirect :

-l’effet direct : la richesse concernée, détenue par d’infimes minorités, est gigantesque. En 1985, quand le magazine Forbes avait commencé son recensement des milliardaires, il en comptait 140 dans le monde. 20 ans après, en 2005, il en recensait 793, qui possédaient ensemble 2600 milliards de dollars, somme équivalente à la totalité de la dette extérieure de tous les pays en développement (dette déjà dix fois payée par les intérêts et premier obstacle actuel à leur sortie de la pauvreté).

Selon le PNUD2, le revenu global des 500 personnes les plus riches du monde est supérieur à celui des 416 millions les plus pauvres. Si l’on prélevait ne serait-ce que 2% du revenu des 10% les plus riches de la population mondiale, on obtiendrait 300 milliards de dollars, un montant suffisant pour faire passer un milliard de personnes au-dessus du seuil de la pauvreté sous lequel elles vivent actuellement !

-L’effet indirect : les groupes sociaux visent à copier le style de vie du groupe se situant au-dessus d’eux. Le phénomène est vrai à l’intérieur de chaque pays, et également au niveau de l’ensemble de la planète, les différents pays prenant comme modèle le niveau de vie des pays les plus riches. Le mode de vie des plus riches tire vers le haut le niveau de consommation générale. Eux-mêmes consomment et gaspillent beaucoup, mais surtout ils répandent un modèle culturel de surconsommation et de surgaspillage.

Baisser le niveau de vie des plus riches par l’augmentation des impôts, par l’établissement d’un revenu maximum etc. aura un effet en cascade dans l’autre sens, celui d’une consommation plus raisonnée de la classe moyenne mondiale, ces 500 millions de personnes qui ont dans leur main l’avenir de cette planète.

Mais cette oligarchie mondiale, 8 à 9 millions de millionnaires sur la planète, n’entend pas se laisser déposséder ainsi de ses privilèges. Elle fera tout pour s’opposer à une telle politique de réduction des inégalités mondiales. La lutte contre les inégalités et les privilèges est plus que jamais à l’ordre du jour, et cette fois-ci ce n’est pas seulement la justice sociale qui l’exige, mais l’enjeu écologique, la survie de l’espèce.

Cela exige de réunir, à l’échelle du local et à celle du mondial, les revendications sociales et écologistes, afin de créer le rapport de forces suffisant pour changer de cap. Il faut créer un mouvement social qui prenne en main ensemble la crise écologique et la crise sociale.

C’est plus grave qu’on ne le croit

Hervé Kempf, journaliste spécialisé dans les questions d’environnement réputé comme l’un des plus rigoureux et les mieux informés, alerte avec force sur l’urgence d’un tel changement de cap. En effet, la crise écologique est plus grave et plus globale que l’image pourtant déjà assez catastrophique qu’on en a en général.

1) Le réchauffement climatique se produit à une vitesse plus importante que ce qui était prévu jusqu’à présent. Le 4e rapport du GIEC publié en 2007 envisage qu’il pourrait dépasser le niveau maximal qui était antérieurement envisagé. Mais surtout, les experts craignent que divers facteurs et mécanismes, qu’Hervé Kempf décrit avec beaucoup de clarté et de pédagogie, ne provoquent un effet de seuil qui ferait s’emballer le système climatique. Le réchauffement, au lieu de s’opérer graduellement, pourrait alors advenir brutalement rendant l’adaptation progressive des sociétés impossible.

2) La crise de la biodiversité est également très inquiétante. Il s’agit de la 6e crise d’extinction majeure des espèces, et de la plus importante depuis que les dinosaures ont disparu il y a 65 millions d’années. Là également, les spécialistes commencent à redouter le passage d’un seuil, au-delà duquel des phénomènes brutaux et irréversibles de dégradation s’enclencheraient, avec des conséquences graves pour la santé publique, l’agriculture et l’économie.

3) On constate également une détérioration sans précédent du plus grand écosystème du monde, à savoir les océans et une pollution chimique de plus en plus préoccupante des airs, des terres et des eaux.

4) La pression écologique sur la biosphère s’accélère incroyablement vite avec la fantastique expansion de la Chine et de l’Inde. Les capacités de récupération de la planète (Repousse des forêts coupées, recharge des réserves d’eau pompées, recyclage par la biosphère du gaz à effet de serre....) sont désormais dépassées. D’après l’expert suisse Mathis Wackernagel, en 1960, l’humanité entière n’utilisait que la moitié de la capacité biologique de la planète, en 2003, elle tirait 1,2 fois sur cette capacité, c’est-à-dire qu’elle consomme désormais davantage de ressources biologiques que la planète n’en produit : le compte à rebours est entamé.

5) Le niveau de production du pétrole va désormais inexorablement décliner alors que la consommation mondiale continue à augmenter : c’est le fameux Pic de Hubbert, qui va également affecter le gaz et divers minerais. D’où l’explosion du prix du pétrole qui ne fait que commencer et qui va terriblement remettre en question nos systèmes de production et de transports.

Agir aujourd’hui

Bref, Hervé Kempf explique que "nous sommes entrés dans un état de crise écologique durable et planétaire. Elle devrait se traduire par un ébranlement prochain du système économique mondial."

Il poursuit : "C’est dans les dix années à venir qu’il nous faut reprendre le gouvernail du cargo que dirigent aujourd’hui des capitaines irresponsables (...) Quelle est la priorité ? Les profits, ou le bon cap?"

Saurons-nous entendre le cri d’alarme lancé par l’un des observateurs les plus réputés de l’état de notre planète ainsi que ses appels à lutter au plus vite pour les solutions qui s’imposent ? Les habitant(e)s du Pays Basque nord auront en tout cas les mardi 12 et mercredi 13 février l’occasion exceptionnelle de pouvoir l’entendre et dialoguer avec lui3. Une occasion à ne pas manquer et qui pourrait, qui devrait être le départ d’une nouvelle dynamique de prise de conscience et de réaction face à l’inacceptable.

C’est aujourd’hui qu’il nous faut agir, après il risque fort d’être trop tard.

1 L'empreinte écologique est la superficie de terre productive et d'écosystèmes aquatiques nécessaires pour la production des ressources utilisées et l'assimilation des déchets produits par une personne ou une population donnée

2 PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement, agence spécialisée de l'ONU

3 Conférences publiques et gratuites le mardi 12 à 20h30 à Laborantza Ganbara et le mercredi 13 à 20h30 au local de la Fondation Manu Robles-Arangiz à Bayonne (pour cette dernière, inscription au 06 14 99 58 79 ou iparmrafundazioa.org), discussion ouverte avec les étudiant(e)s, lycéen(ne)s et enseignant(e)s au grand amphi de la Fac de Bayonne, cours du Comte de Cabarrus le mercredi à 16h00.


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