Anchois : un accord qui ne satisfait guère les pêcheurs
·Les professionnels labourdins et ceux de Bizkaia et du Gipuzkoa sont surpris de ce TAC zéro assorti d’une "pêche expérimentale"
La ministre espagnole de la Pêche Elena Espinosa et son homologue français Dominique Bussereau ont trouvé dans la nuit de mercredi à jeudi un accord sur l’anchois, bouclant ainsi 36 heures de négociations difficiles. Une solution inédite a été trouvée concernant cette espèce pour laquelle la Commission européenne avait proposé un moratoire dans les eaux du Golfe de Gascogne. Alors que Madrid s’alignait sur cette proposition, Paris réclamait la reconduction du TAC (Taux admissible de captures) 2006, soit 5000 tonnes. Finalement c’est le TAC zéro qui a été décidé. Sauf qu’une "pêche expérimentale" de deux mois, du 15 avril au 15 juin, sera autorisée pour seulement 10% des navires des deux pays, soit 20 bateaux espagnols et 8 français. Du 15 juin au 15 juillet, les pêcheurs pourront en revanche commercialiser leurs pêches, après quoi une nouvelle décision sera prise en fonction de l’avis des scientifiques, a-t-on précisé au ministère français. Le ministre finlandais de l’Agriculture Juha Korkeaoja, qui présidait les négociations, s'est déclaré "satisfait de cette décision importante". Le ministre français s’est lui aussi montré satisfait du compromis trouvé. "Nous avons obtenu de pouvoir rouvrir la pêche pendant une période expérimentale. Si les résultats sont bons, on pourra pêcher plus longtemps", a estimé Dominique Bussereau. Le ministre a également jugé l’ensemble de l’accord "correct et acceptable". "Tout le monde a fait des compromis. La France va pouvoir pêcher plus certaines espèces: la lotte, la langoustine, la sole. Un tout petit peu moins certaines autres, mais beaucoup moins que le prévoyait la Commission européenne", a-t-il déclaré hier matin. Satisfaction aussi chez la ministre espagnole Elena Espinosa, qui a estimé que son pays avait par ailleurs réussi à augmenter ses quotas pour les espèces qui avaient le plus de valeur commerciale. Le commissaire européen à la Pêche, le Maltais Joe Borg, a estimé que l’accord "difficilement" conclu "renforce notre approche progressive mais persistante pour une pêche durable". Mais le WWF a estimé que les décisions des 25 montrent qu’ils continuent "à négocier les quotas comme des marchands de chevaux, alors que les océans sont en crise, une réalité que la Commission et les 25 ont choisi de nier une fois de plus". Sur l’anchois du Golfe de Gascogne, le WWF a déploré le "cadeau supplémentaire" des 25. Avec 28 bateaux autorisés à participer à la "pêche expérimentale", "il y a peu d’espoir que le stock d’anchois tienne le choc", a estimé l’organisation.
Les pêcheurs mécontents
Côté pêcheurs, l’accord a provoqué d’abord la surprise, puis l’insatisfaction. "Cet accord est très très surprenant. Je ne vois pas comment sur deux mois de pêche on pourra faire tourner huit bateaux sur un total de 80Š Pour nous cet accord n’est pas du tout satisfaisant", s’est plaint le président du comité local des pêches de Saint-Jean-de-Luz/Ciboure Serge Larzabal. Hier le représentant des professionnels labourdins a pu s’entretenir avec le directeur des Pêches à qui il a pu exprimer son étonnement. "Je lui ai dit que nous ne voyons pas l’intérêt d’un tel accord basé sur le roulement de 80 bateaux pendant deux mois, ce qui fait trois ou quatre jours de pêche" par navire. Le directeur des Pêches "a pris acte", lui avançant que tout sera mis au point lors d’une prochaine réunion entre tous les représentants du secteur de la façade Atlantique. Une dizaine de bolincheurs et quatre chalutiers pélagiques basés au port lohizundar sont concernés par cette pêcherie.Quant aux professionnels du Gipuzkoa et de Bizkaia, le mécontentement était aussi le sentiment général hier après avoir pris connaissance de l’accord. Sauf que les raisons sont bien différentes de celles exposées par Serge Larzabal. Pour les professionnels du sud, l’anchois est une espèce en danger qu’il faut protéger "pour protéger par la suite le secteur, car sans anchois toute une filière risque de disparaître". Ils ont entre autres critiqué le fait qu’il n’y ait pas de limite du tonnage pour les captures réalisées pendant cette période "expérimentale".
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