Le ministre de l’Éducation nationale, Gilles de Robien, a déclaré récemment sur les ondes de Radio Notre-Dame (sic): "Je crois vraiment qu’il faut donner aux enseignements privés et public une égalité de moyens, de façon à ce que le choix s’exerce dans la plus pleine neutralité des consciences.". Quelques jours avant, il avait visité à Cholet un collège privé (une première pour un ministre de la république).
Voulait-il seulement flatter ceux qui s’extasient quand ils entendent que l’école privée est "une liberté de plus offerte"? Avait-il vraiment l’intention de donner au privé des moyens supplémentaires, ce qu’il a nié ensuite ? Pourquoi alterne t’il le chaud et le froid sur un sujet aussi sensible à l’heure du prochain centenaire de la loi 1905 ?
En tout cas, ses propos ont déclenché un énorme tollé chez les défenseurs de l’école publique. Reconnaissons qu’il y a de quoi être choqué par ces propos ministériels, au moment même où est supprimée une multitude de postes d’enseignants dans les premiers et second degré.
La FCPE64 était présente à Paris le 10 septembre pour participer à la réunion de rentrée des responsables départementaux de notre fédération en présence du ministre. Sa venue était très attendue, suite à la polémique déclenchée par ses propos peu laïques tenus sur des ondes cléricales. Récusant l’argument lancé par le président national de la FCPE de "vouloir rallumer la guerre scolaire", Gilles de Robien, la main sur le c¦ur, nous a imploré: " Vous savez, la guerre ! Dans la Somme, nous connaissons !".
Pour notre part, ses explications ne nous ont guère convaincus. Son souci de devoir, "en bon père de famille", se préoccuper, dans le respect des lois existantes, de l’avenir de tous les enfants, y compris des 2 millions d’élèves scolarisés en privé, est certes louable. Mais ces bonnes paroles teintées de paternalisme ne sauraient suffire à calmer les esprits laïcs et républicains. Nous attendions une mise au point très claire sur la différence entre école privée et école de la République et celle-ci n’a pas eu lieu.
Monsieur de Robien a justifié sa visite dans un collège privé par le fait que les écoles sous contrat faisaient partie intégrante du système éducatif (prudent, il n’a pas réemployé le terme Education nationale), avec des enseignants rémunérés par l’Etat, en feignant d’ignorer que les conditions pour parler d’école républicaine étaient loin d’être toutes remplies. L’école de la république ne peut pas être et ne sera pas l'école de la ségrégation sociale.
En effet, quid de la laïcité et de la gratuité dans ces écoles ? Et qu’en est-il de l’accès garanti à tous, inscrit dans les missions du service public ? Le privé, quant à lui, sélectionne les élèves à l’entrée, évite les zones défavorisées et scolarise dans une très faible proportion les élèves en situation de handicap.
Les méthodes actuelles de l’enseignement privé, autant subtiles qu’efficaces, consistent à surfer sur le consumérisme ambiant, en pratiquant une concurrence peu loyale. Ainsi, certains collèges privés recrutent les élèves du public, de préférence les bons, en proposant des choix d’options inexistants dans le public. De même, à titre d’exemple pour notre département, les parents attachés au service public ont un choix des plus restreints quand leurs enfants veulent se diriger vers les métiers de l’agriculture: un seul lycée public dans le département, aucun en Pays Basque.
Face à une politique de restrictions budgétaires sans précédent menée depuis 3 ans, Monsieur le Ministre de l’Education nationale aurait été bien inspiré d’apparaître comme le garant de la qualité du service public d’éducation. Nous retiendrons au contraire que sa politique éducative s’inscrit dans l’organisation d’une concurrence, sans aucun doute "libre et non faussée", entre public et privé, au nom de la liberté de choix des familles !