Le premier récit de Saint-Exupéry, inédit, est publié
·L’écrivain-aviateur se l’était vu refuser par Gallimard qui l’édite
Pourquoi nous avait-on caché ça? Car l’existence de l’inédit, écrit au milieu des années 1920 et intitulé Manon, danseuse, était un secret de polichinelle pour les initiés, comme le raconte un spécialiste de l’écrivain français, Alban Cerisier, officiant chez Gallimard: "on en connaissait l'existence, mais on ne savait pas trop si c'était un texte très court ou plus long. Saint-Exupéry en parle beaucoup dans sa correspondance. Il le soumet à Gaston Gallimard, il demande l'avis de Gide". Le récit finalement a été retrouvé "dans une collection privée", a-t-il ajouté sans plus de précision...Mystère et boule de gomme. Un de plus à éclaircir pour les tenants de la théorie du self complot et qui continuent à croire à un suicide à cause de son dernier écrit, précédant de peu son crash méditerranéen en 1944 : "la fourmilière future m’épouvante" (voir le téléfilm avec un étonnant Bernard Giraudeau, campant un héros prématurément usé par ses aventures aéropostales)... Nous, ce qui ne nous épouvante pas, c’est que la magie subsiste au c¦ur même de la fourmilière et que de tels écrits puissent émerger de l’abîme de l’oubli. Manon, danseuse est un texte d'une quarantaine de feuillets dactylographiés, constituant la première tentative romanesque de Saint-Ex, qui n'avait pas alors réussi à le faire publier. L’histoire d'amour tragique entre une jeune prostituée et un homme d'une quarantaine d'années. Il sera publié en novembre en coffret avec plusieurs autres inédits, dont les textes de deux conférences de 1935 sur l'aviation "et tout ce qui naît de richesse intérieure chez l'homme confronté à la contrainte", souligne Alban Cerisier. Pionnier de l’aéropostale, Saint-Exupéry avait percé avec Courrier Sud (1928), premier roman célébré à l’époque par le même André Gide. Remords d’un mauvais conseil auparavant ? Il lui écrit : "N’arrêtez pas de voler, ou alors n’écrivez plus". C’est que Saint-Ex, peut-être un dernier Mohican du romantisme à la française, se distinguait par un refus de choisir entre l’action et la poésie. Parfois tenté par un moralisme un peu solennel sur des sujets écologiques avant l’heure (Terre des Hommes), à moins d’assumer sa fibre de conteur (Le petit prince), il donnait le meilleur de lui-même dans le récit de situations épiques (Pilote de guerre).
|